samedi 2 août 2014

Des systèmes triatomiques géants!


      Certaines propriétés des « états d’Efimov », des systèmes où trois atomes identiques sont liés, viennent d’être confirmées par l’expérience.


         Dans les états d’Efimov, le système d'atomes n’est lié 
            que parce que trois atomes sont en présence.
      La vue d’artiste représente l’état fondamental (à gauche) 
                      et le premier état excité (à droite).
 
En général, deux atomes identiques ne se lient pas ensemble, mais la venue d’un troisième atome peut créer un ménage à trois stable. Ce phénomène d’origine quantique a été prédit par le physicien russe Vitaly Efimov en 1970. Il fallut attendre 2006 pour que le premier état d’Efimov soit observé, grâce aux progrès dans le domaine des atomes ultrafroids. Mais parmi les propriétés que le théoricien avait prévues, il restait à montrer que les systèmes triatomiques de ce type existent dans des états excités. Découvreur du  premier état d’Efimov, Rudolf Grimm, de l’Université d’Innsbruck, et son équipe ont maintenant mis en évidence le premier état d’Efimov excité et confirmé certaines de ses caractéristiques.
La difficulté expérimentale est grande. La formation d’états d’Efimov exige que la probabilité de collision entre particules soit importante à basse énergie – une situation nommée résonance de Feshbach. Une fois les trimères formés, ils restent très fragiles : l’énergie de liaison est si faible que le trio peut se dissocier facilement. En 2006, R. Grimm et ses collègues avaient utilisé des atomes de césium refroidis à quelques centaines de nanokelvins pour former des trimères dans l’état d’Efimov fondamental, dont la taille est d’environ 50 nanomètres.
D’après la théorie de V. Efimov, le premier état excité a la même forme que l’état fondamental, mais sa taille est multipliée par un facteur d’environ 22,7. Pour le césium, cela implique un premier état excité d'environ un micromètre d'extension, soit la taille d’une bactérie. Mais l’énergie de liaison entre les atomes étant divisée par le même facteur élevé au carré, il fallait abaisser la température jusqu'à quelques nanokelvins pour espérer l’observer.
R. Grimm et son équipe ont ainsi utilisé un ensemble de 30 000 atomes de césium refroidis à 7 nanokelvins et maintenus dans un piège magnétique. Ils ont ensuite fait varier le champ magnétique afin de se rapprocher continûment des conditions de la résonance de Feshbach correspondand aux états excités et faire ainsi apparaître des états d’Efimov excités. Lorsqu’on est au seuil de l’apparition de tels états, la probabilité de trouver trois atomes proches dans le gaz augmente fortement, ce qui augmente les chances de collisions à trois corps. Or ces collisions confèrent parfois une grande vitesse à certains des atomes, qui s’échappent alors du piège. En résumé, la formation d’états d’Efimov s’accompagne d’un pic de fuite d’atomes. En notant pour quelle valeur du champ magnétique ce pic se produit, les physiciens ont déduit les caractéristiques du premier état excité d’Efimov. Ils trouvent que le trimère correspondant a une taille 21 fois supérieure à celle du trimère dans l’état fondamental, un résultat en accord avec les prévisions théoriques compte tenu des incertitudes de mesure.
La théorie d’Efimov s'appliquerait à des situations diverses, et permettrait par exemple de décrire le noyau de lithium 11, constitué d’un groupe compact de nucléons et de deux neutrons plus éloignés, et bien d’autres systèmes atomiques ou nucléaires.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire