La répétition des épisodes dépressifs peut endommager de façon permanente certaines fonctions cognitives, comme l'attention ou l'aptitude à réaliser rapidement des tâches intellectuelles simples.
C'est un résultat loin d'être anodin qui vient d'être obtenu par le médecin Philip Gorwood (Centre Hospitalier Sainte-Anne, Paris) et ses collègues. Et pour cause, puisque ces chercheurs de l'INSERM viennent de démontrer que la répétition des épisodes dépressifs est susceptible d'endommager de façon permanente les fonctions du cerveau.
Plus précisément, Philip Gorwood et ses collègues ont réussi à montrer que les personnes qui ont déjà connu au moins deux épisodes dépressifs au cours de leur existence exécutent des tâches cognitives courantes beaucoup plus lentement que les personnes qui n'ont jamais connu d'épisodes dépressifs, et ce même lorsque ces épisodes dépressifs sont terminés depuis longtemps. En d'autres termes, la répétition des épisodes dépressifs est ni plus ni moins susceptible de laisser des séquelles permanentes dans les fonctions cérébrales des personnes dépressives.
Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs français ont réalisé une vaste étude auprès d'un panel de 2000 volontaires ayant connu au moins un épisode dépressif au cours de leur existence. Pour mesurer leurs capacités cognitives, les auteurs de l'étude ont évalué la rapidité des volontaires à réaliser un test simple, consistant à relier des cercles numérotés sur une feuille.
Détail important : cette évaluation a été réalisée deux fois pour chaque volontaire : une première fois durant l’épisode dépressif, puis une deuxième fois six semaines après l'épisode dépressif, lorsque les volontaires ne présentaient plus aucun symptôme dépressif.
Résultat ? Les volontaires qui n'avaient connu qu'un seul épisode dépressif dans le passé ont mis en moyenne 35 secondes pour réaliser le test. Mais pour les volontaires qui avaient déjà vécu au moins deux épisodes dépressifs, le temps mis pour réaliser le test s'est avéré beaucoup plus long : une minute et 20 secondes en moyenne, au lieu de 35 secondes. Et ce même lorsque les symptômes du dernier épisode dépressif avaient totalement disparu.
Evidemment, il est connu que les fonctions cognitives peuvent être considérablement ralenties (attention, concentration...) durant une phase dépressive. Mais la nouveauté est ici que ce ralentissement peut perdurer même après la fin de l'épisode dépressif, ce qui incite Philip Gorwood à qualifier la dépression d'évènement "neurotoxique". Ce dernier estime par ailleurs que si l'épisode dépressif n'a pas été traité à temps, ce ralentissement est susceptible de s'installer définitivement chez le patient.
Ces travaux ont été publiés dans l'édition du mois d'octobre 2014 de la revue European Neuropsychopharmacology, sous le titre "Psychomotor retardation is a scar of past depressive episodes, revealed by simple cognitive tests" .
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